Quelques réflexions à propos du Calaisis, du traitement juridique des exilés, du juge administratif et du CGLPL

Sommaire

    [Cet article ne prétend pas rendre compte de l’intégralité des décisions ayant pu être rendues à propos des exilés déplacés par l’Administration en dehors de Calais durant ces derniers mois. Il s’agit simplement de présenter quelques décisions et en tirer des éléments de réflexion. Toute remarque ou réflexion sera accueillie avec intérêt par l’auteur de ces lignes, n’hésitez donc pas à laisser un commentaire.]

     

    INTRODUCTION

    Près de quinze ans après la fermeture du camp de Sangatte, la ville de Calais et ses environs (le Calaisis) sont désormais immanquablement associés aux « Jungles », différents camps regroupant des exilés cherchant à rejoindre le Royaume-Uni.

    La situation, extrêmement tendue du fait de l’importance de la concentration d’exilés (plusieurs milliers), fait régulièrement l’objet d’une couverture médiatique nationale et internationale, qu’il s’agisse des tentatives fréquentes d’intrusion dans le tunnel, des accidents mortels ou encore de l’ordonnance du 23 novembre 2015 par laquelle le Conseil d’État a enjoint l’État d’effectuer des aménagements sanitaires (mise en place de points d’eau, de toilettes, de collecte des ordures, création d’un point d’accès au service d’urgence) ainsi que de procéder à la recension des mineurs isolés présents sur le site1.

    Une histoire a été un peu moins médiatisée mais mérite pourtant qu’on s’y attarde : il s’agit de la politique dite de « désengorgement » du Calaisis, pilotée par la Préfecture du Pas-de-Calais depuis juin 2015 et qui a connu son point d’orgue au cours du dernier trimestre de cette même année, notamment à partir du 21 octobre.

    Durant cette période, la police a procédé à des interpellations massives d’étrangers. Une fois établi le constat de l’irrégularité du séjour des étrangers arrêtés, la Préfète a systématiquement édicté à leur encontre des obligations de quitter le territoire (OQTF) sans délai de départ volontaire (article L. 511-1 du CESEDA), assorties de décisions de placement en rétention (L. 551-1 du CESEDA).

    Alors qu’il existe un centre de rétention administrative (CRA) dans la région, situé à Coquelles, la décision a été prise de procéder au transfert des retenus vers d’autres CRA (Le Mesnil-Amelot, Marseille, Metz, Nîmes, Paris-Vincennes, Rouen-Oissel et Toulouse-Cornebarrieu).

    Aux termes de l’article L. 553-2 du CESEDA, il est en effet possible pour l’Administration d’opérer de tels transferts « [e]n cas de nécessité »2. Les cas de nécessité généralement envisagés tiennent à des considérations relatives aux places disponibles ou aux particularités de certains CRA (ils ne sont pas tous habilités à recevoir des familles, et notamment des enfants en bas âge). Cependant, alors que le CRA de Coquelles n’était pas saturé, la « nécessité » de ces transferts n’apparaît pas spécialement évidente.

    Surtout, aux termes à la fois de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, dite Directive retour, et des dispositions pertinentes du CESEDA, la rétention ne doit avoir pour seule fin que l’exécution de la mesure d’éloignement. Or, les statistiques établies par les associations qui interviennent dans les CRA montrent que la plupart des retenus ont été libérés, parfois très rapidement (avant même l’issue du délai de cinq jours au terme duquel le juge des libertés et de la détention est saisi, article L. 552-1 du CESEDA). Les mesures d’éloignement n’ont pas été exécutées et les libérations des retenus ont d’ailleurs parfois été ordonnées par l’Administration elle-même.

    L’absence d’exécution des mesures d’éloignement, conjuguée avec le transfert massif des étrangers retenus dans d’autres centres de rétention, amène à se poser des questions quant à l’attitude de la Préfète du Pas-de-Calais.

    Quelques articles de presse se sont fait l’écho de cette situation, qui a été dénoncée par de nombreuses ONG, ce qui a attiré l’attention de Mme Adeline Hazan, Contrôleure générale des lieux de privation des libertés (CGLPL) qui a décidé de mener une enquête in situ et a rendu, le 13 novembre 2015, des Recommandations en urgence4.

    Sans faire le tour de l’ensemble des griefs qui peuvent être opposés à l’Administration dans cette affaire5, il peut être intéressant de s’intéresser à deux points : d’une part, la violation de l’interdiction des expulsions collectives (1) et, d’autre part, le détournement de l’objet du placement en rétention (2).

    1. La prohibition des expulsions collectives

    Aux termes des stipulations de l’article 4 du protocole 4 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales6, « [l]es expulsions collectives d’étrangers sont interdites. ». Aux termes de la jurisprudence de la Cour EDH, il faut entendre par expulsion collective :

    « toute mesure contraignant des étrangers, en tant que groupe, à quitter leur pays, sauf dans les cas où une telle mesure est prise à l’issue et sur la base d’un examen raisonnable et objectif de la situation particulière de chacun des étrangers qui forment le groupe » (Cour EDH, 5 février 2002, Čonka c. Belgique, n° 51564/99, §59).

    Il importe donc, afin de déterminer l’existence d’une expulsion collective, de prendre en compte le contexte dans lequel des mesures d’éloignement sont adoptées. Dans l’affaire Čonka c. Belgique, la Cour condamne la Belgique en observant que la procédure d’expulsion suivie n’offre pas la garantie que l’État a pris en compte la situation individuelle des requérants.

    « 61. […] au vu du grand nombre de personnes de même origine ayant connu le même sort que les requérants, la Cour estime que le procédé suivi n’est pas de nature à exclure tout doute sur le caractère collectif de l’expulsion critiquée. 62. Ces doutes se trouvent renforcés par un ensemble de circonstances telles que le fait que préalablement à l’opération litigieuse les instances politiques responsables avaient annoncé des opérations de ce genre et donné des instructions à l’administration compétente en vue de leur réalisation ; que tous les intéressés ont été convoqués simultanément au commissariat ; que les ordres de quitter le territoire et d’arrestation qui leur ont été remis présentaient un libellé identique ; qu’il était très difficile pour les intéressés de prendre contact avec un avocat ».

    Ainsi, pour la Cour EDH, les circonstances entourant la mise en œuvre peuvent dévoiler un traitement collectif des décisions d’éloignement. La Cour EDH exige des garanties suffisantes attestant d’une prise en compte réelle et différenciée de la situation individuelle de chacune des personnes concernées, et non un respect de l’examen individuel qui ne serait que de façade. L’interdiction des expulsions collectives se comprend en effet comme l’amoindrissement des garanties qu’une telle procédure implique.

    Le juge français se montre peu enclin à reconnaître la qualification d’expulsion collective. Le Conseil d’État semble ainsi considérer automatiquement qu’une mesure portant OQTF étant individuelle, le moyen tiré de la violation de l’article 4 du protocole 4 de la Conv. EDH est inopérant (CE, 29 décembre 1993, n° 136065). Autrement dit, face à une OQTF, il présume qu’il s’agit là d’une mesure individuelle et ne semble pas rechercher si le contexte de l’adoption de la mesure d’éloignement démontre l’existence d’une expulsion collective, à rebours, donc, de la conception de la Cour européenne.

    Dans les affaires relatives aux exilés de Calais, les juridictions de première instance ont adopté des points de vue très divergents. Ainsi, le tribunal administratif (TA) de Toulouse considère que :

    « dès lors que la décision obligeant M. X à quitter le territoire français a été précédée d’un examen individuel de sa situation personnelle et alors même qu’elle a été prise concomitamment à des mesures d’éloignement concernant de nombreux autres étrangers en situation irrégulière à Calais, elle ne constitue pas une expulsion collective » (TA Toulouse, 2 novembre 2015, requête n°1504911, cons. 8).

    Dans la même veine, un jugement du tribunal administratif de Rouen mérite une attention particulière (TA Rouen, 28 janvier 2016, requête n°1503393). Le juge, en effet, y considère que le requérant « n’est (…) pas fondé à soutenir qu’il a fait l’objet d’une mesure collective qui le visait de façon indiscriminée et que son cas n’a pas fait l’objet d’un examen individuel » (cons. 4). Il refuse donc d’annuler la décision portant OQTF en se cachant derrière une apparence de traitement individualisé par la Préfète.

    Or, la lecture de la décision montre que le juge lui-même ne semble pas avoir procédé à un examen individualisé de la situation du requérant. Par deux fois, en effet, le patronyme du requérant est mal reproduit. Plus exactement, le juge a substitué deux patronymes de deux requérants dont les affaires étaient audiencées le même jour.

    Pour le dire autrement, le juge rouennais s’est contenté de procéder à un copier/coller d’une de ses décisions pour rejeter la requête et a oublié de vérifier que les noms des requérants avaient été correctement substitués.

    Cette cocasserie vient sérieusement écorner l’ensemble de la motivation développée dans le jugement. Comment accepter la thèse selon laquelle la Préfète du Pas-de-Calais aurait effectué un examen individuel de plus d’un millier d’étrangers arrêtés à Calais en un temps record, alors même que le juge donne ici sérieusement l’impression ne pas avoir lui-même exercé son office d’une manière très attentive ?

    En revanche, le TA de Marseille adopte une position inverse dans plusieurs décisions et, sans se prononcer sur la prohibition des expulsions collectives, retient néanmoins l’absence d’examen personnel pour annuler les OQTF :

    « il ressort des pièces du dossier que M. B… C… de nationalité afghane a déclaré, lors de son audition par les services de police le 26 octobre 2015, avoir quitté son pays il y a un mois et demi ; qu’il a été interpellé en compagnie de 39 autres personnes ayant également fait l’objet d’une procédure de vérification du droit au séjour ; que si l’arrêté attaqué comporte les éléments de droit qui en constituent le fondement, le préfet du Pas-de-Calais s’est contenté de mentionner, dans les visas de son arrêté, l’identité de M. B…C…, sa nationalité présumée et sa date de naissance déclarée, sans autre élément de fait relatif à sa situation ; que, par ailleurs, plusieurs décisions ayant un objet identique et rédigées dans les mêmes termes ont été opposées par le préfet du Pas-de-Calais le 26 octobre 2015, à des étrangers en situation irrégulière interpellés dans les mêmes conditions ; que, par suite, dans les circonstances particulières de l’espèce, ni les mentions de l’arrêté attaqué ni les pièces du dossier ne permettent d’établir que le préfet du Pas-de-Calais a procédé à un examen personnel de la situation de M. B… C…; que ce dernier est, pour ce motif, fondé à demander l’annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français » (TA Marseille, 17 décembre 2015, n° 1508564)7.

    Il faut ici noter que les décisions marseillaises sont postérieures à la publication des Recommandations en urgence de la CGLPL. Surtout, dans le jugement du 17 décembre 2015, le requérant a été interpellé le 26 octobre 2015, date à laquelle la CGLPL s’est précisément rendue à l’hôtel de police de Coquelles. La CGLPL y décrit un « traitement de masse des déplacements induisant une prise en charge collective et sommaire qui prive les personnes de l’accès à leurs droits » et souligne les différentes atteintes aux droits induits par la politique de la Préfète.

    On peut alors se demander si ce n’est pas la lecture des Recommandations, circonstanciées et précises, qui a pu influencer le juge. Néanmoins, celui-ci ne les cite pas souvent dans ses décisions et quand il le fait, c’est en prenant soin d’affirmer que « ces recommandations et constatations […] ne lient pas le juge administratif » (TA Rouen, 28 janvier 2016, requête n°1503393, cons. 11).

    2. Un détournement de la procédure de rétention

    Aux termes des articles L. 554-1 du CESEDA et 15 de la Directive retour8, le placement d’un étranger en rétention doit n’avoir pour seule finalité que l’éloignement, à plus bref délai possible, de ce dernier.

    Autrement dit, un étranger ne peut être placé en rétention administrative aux fins de l’exécution forcée d’une mesure d’éloignement, que s’il existe, d’une part, une perspective raisonnable d’éloignement et, d’autre part, un risque que l’étranger se soustraie à l’exécution de cette mesure, ces deux conditions étant cumulatives.

    Or, il apparaît clairement à plusieurs égards que l’exécution des mesures d’éloignement était impossible (du moins pour certains retenus) et différents éléments permettent par ailleurs d’affirmer que l’Administration n’avait pas sérieusement envisagé une telle exécution.

    De nombreux retenus étaient en effet de nationalité irakienne ou syrienne, ce qui n’est pas anodin compte tenu du second alinéa de l’article L. 513-2 du CESEDA :

    « Un étranger ne peut être éloigné à destination d’un pays s’il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu’il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ».

    <Précisément, en ce qui concerne la Syrie, dans l’affaire L.M. et autres c. Russie du 15 octobre 2015 (requêtes n°40081/14, 40088/14 et 40127/14), la Cour EDH a expressément considéré qu’une mesure d’éloignement vers la Syrie, étant donné le contexte actuel tel qu’il ressort de l’ensemble des rapports internationaux relatifs au conflit qui y fait rage, constituait une violation des articles 2 (droit à la vie) et 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants) de la Convention.

    Il est à cet égard intéressant de remarquer que, dans plusieurs OQTF consultées concernant des ressortissants syriens, le pays de destination n’est pas mentionné, l’arrêté préfectoral se contentant de se référer à « tout pays où [l’intéressé] établirait être légalement admissible ». Dès lors que le placement en rétention était décidé, il appartenait à l’Administration d’effectuer les diligences nécessaires pour établir vers quel État les retenus pouvaient être admissibles et, subséquemment, renvoyés.

    De deux choses l’une : soit l’Administration a effectué ces diligences et s’est rendue à l’évidence, à savoir que les retenus n’étaient pas admissibles dans un autre État que la Syrie et ne pouvaient, dès lors pas faire l’objet d’un renvoi forcé pour les raisons déjà indiquées ; soit elle n’envisageait pas, ab initio, l’exécution de la mesure d’éloignement.

    Quelle que soit l’hypothèse retenue, il apparaît dans tous les cas que la Préfète a commis un détournement de procédure en plaçant massivement des étrangers en rétention tout en sachant que l’exécution des mesures d’éloignement dans un délai raisonnable était totalement exclue. C’est d’ailleurs ce que relève la CGLPL qui conclut à « une absence de volonté de mise à exécution des OQTF émises ».

    Le TA de Marseille en est finalement arrivé à la conclusion que la manœuvre de l’Administration ne visait effectivement qu’à « permettre l’évacuation de la zone » de la Jungle (TA Marseille, 29 décembre 2015, requête n°1508776, cons. 5) : il a donc annulé l’OQTF contestée pour détournement de pouvoir9.

    L’absence de volonté d’exécution des mesures d’éloignement de la Préfecture du Pas-de-Calais peut également être présumée de l’attitude de la Préfète lors de la phase contentieuse, d’une manière certes anecdotique mais révélatrice. En effet, l’Administration n’a pas toujours communiqué de mémoire en défense, en réponse aux requêtes introduites par les retenus, illustrant ainsi un manque d’intérêt flagrant pour la question (pour une illustration, voir TA Toulouse, 30 novembre 2015, requête n°1505560). Pire, dans l’un de ses mémoires en défense, la Préfète a explicitement indiqué qu’elle n’avait aucune intention de renvoyer le requérant dans son pays d’origine.

    Pourtant, le détournement de pouvoir n’est pas toujours relevé. Ainsi le TA de Rouen, dans la décision précitée du 28 janvier 2016, semble reconnaître, de manière très indirecte et pour tout dire, à contre-cœur, que la CGLPL conclut à un usage détourné de la procédure de placement en rétention administrative. Toutefois, le placement en rétention n’est pas annulé sur ce fondement, mais plutôt sur celui de l’annulation du choix du pays de destination (ici, la Syrie).

    EN GUISE DE CONCLUSION…

    L’on se contentera de trois remarques.

    Premièrement, l’on reste d’abord assez perplexe devant la finalité de l’opération. S’il s’agissait bien de vider le Calaisis des étrangers, force est de reconnaître l’échec patent de la Préfète. Il est à peu près certain que les retenus, une fois libérés, sont retournés sur place pour tenter de passer au Royaume-Uni. Le nombre d’exilés ne semble pas avoir baissé et, à côté de la Jungle de Calais, un camp est en passe d’être construit à Grande Synthe par MSF. La question du coût et de l’efficacité d’une telle politique est posée : coût économique, mais également juridique (de nombreuses violations du droit ayant été relevées et de nombreuses décisions préfectorales annulées, au moins pour partie).

    Deuxièmement, alors même que les affaires qui ont été soumises aux juridictions administratives présentaient de nombreuses similitudes, de grandes divergences apparaissent à la lecture des différents arrêts. Cela s’explique notamment par le principe de l’économie des moyens. Le juge estime que, dès lors qu’un moyen propre à justifier l’annulation de l’acte administratif a été retenu, il n’a pas à se prononcer sur les autres arguments qui ont été soulevés devant lui10. Cela permet aux juridictions d’exercer un véritable « legal shopping », retenant ici tel argument, ailleurs un autre, ce qui pourrait permettre de comprendre, en partie la cause de discordances jurisprudentielles.

    Troisièmement, il faut souligner l’importance du travail de la CGLPL. Disposant de moyens d’investigation étendus, elle a pu rendre un rapport circonstancié, précis, et qui soulève les nombreuses questions quant à l’action préfectorale en Calaisis.

    L’impact sur le juge administratif reste néanmoins difficile à appréhender. Il serait intéressant de procéder à une véritable étude quantitative de l’ensemble des décisions relatives aux exilés de Calais afin de confirmer l’hypothèse selon laquelle les Recommandations de la CGLPL ont pu avoir une influence certaine sur l’évolution de la jurisprudence des différents tribunaux administratifs saisis. Malheureusement, la tâche est pour le moins ardue, principalement dans la mesure où l’Administration ne permet pas d’accéder facilement à des jugements rendus en première instance dont la publication dépend, au final, du bon vouloir de chaque juridiction.

    Pour citer ce document : Vincent Souty, « Quelques réflexions à propos du Calaisis, du traitement juridique des exilés, du juge et du CGLPL », Fondamentaux.org, 8 février 2016 [http://fondamentaux.org/?p=709]

     

    1. À noter que des ONG viennent de saisir à nouveau le juge des référés du fait de la carence de l’État qui ne semble pas avoir respecté les injonctions du Conseil d’État.
    2. « En cas de nécessité et pendant toute la durée de la rétention, l’autorité administrative peut décider de déplacer l’étranger d’un lieu de rétention vers un autre lieu de rétention, sous réserve d’en informer les procureurs de la République compétents du lieu de départ et du lieu d’arrivée, ainsi que, après la première ordonnance de prolongation, les juges des libertés et de la détention compétents ».
    3. comme le lui permet l’article 9 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

      Les conclusions des Recommandations de la CGLPL sont éloquentes : selon elle, le seul objectif poursuivi par la Préfète était celui de « désengorger » Calais. Mais cette politique s’est opérée au prix de nombreuses violations du droit.

      De nombreux griefs peuvent en effet être retenus à l’encontre de ces déplacements forcés d’étrangers, même si la jurisprudence relevée apparaît relativement décevante à cet égard et, surtout, très disparate3Il faut ici préciser que la juridiction territorialement compétente pour connaître du contentieux lié à un placement en rétention est celle du ressort dans laquelle se situe le CRA dans lequel l’étranger retenu a été placé.

    4. Il faut en effet souligner que des questions se posent concernant le droit de demander l’asile et, de manière plus générale, le droit à l’information dont doivent bénéficier les étrangers durant la procédure.
    5. Protocole ratifié par la France le 3 mai 1974.
    6. Voir également TA Marseille, 29 décembre 2015, n° 1508776, cons. 4.
    7. « les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l’éloignement ».
    8. « le requérant soutient que la préfète du Pas-de-Calais utilise la procédure d’éloignement dans le but exclusif de l’éloigner de Calais afin de mettre un terme à la concentration d’un grand nombre de ressortissants étrangers aux abords de cette ville ; que ces affirmations précises et circonstanciées, au demeurant non contredites par l’autorité préfectorale, sont clairement établies par l’ensemble des pièces du dossier ; que le requérant doit dès lors être regardé comme apportant la preuve que l’autorité préfectorale n’a pas, en édictant cette obligation, poursuivi les objectifs en vue desquels lui ont été conférés les pouvoirs afférents à la police spéciale des étrangers, et qu’elle a seulement, ce faisant, entendu permettre l’évacuation de la zone précitée ; qu’ainsi le requérant est également fondé à soutenir que la décision l’obligeant à quitter le territoire français, est entachée de détournement de pouvoir » (TA Marseille, 29 décembre 2015, n°1508776, cons. 5).
    9. L’économie de moyen est généralement illustrée par la mention « sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ».

    Commentaires

    POC

    Deux toutes petites remarques : d’abord, il y a un autre CRA dans la région, à Lesquin ; ensuite, pour que les juridictions annulent pour détournement de pouvoir, encore faut-il que le moyen soit soulevé…

    Réponse
    Vincent Souty

    Je n’ai pas eu accès à toutes les requêtes. Mais l’ensemble de celles auxquelles j’ai pu avoir accès invoquaient, bien évidemment, le détournement de pouvoir…

    Réponse

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